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Militant Haut-Rhinois du MoDem
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22 février 2011

François Bayrou: "L'arme la plus efficace et la plus rôdée contre les problèmes qui se posent, c'est la loi de 1905 sur la laïci

Bayrou_congres

Dans une interview au journal Le Parisien, publiée dimanche 20 février, François Bayrou, président du Mouvement Démocrate et député des Pyrénées-Atlantiques, déplore les errements de la diplomatie française et stigmatise « l'affaiblissement de la fonction présidentielle ».

Il redoute aussi les conséquences du débat sur l'Islam que veut lancer la majorité. Découvrez ses propos en intégralité.

Le Parisien: Le printemps arabe peut-il accoucher de démocraties?

François Bayrou: Ce mouvement est vital pour les peuples qui se libèrent et vital pour nous. Je me suis toujours battu contre les gens qui prétendaient que la démocratie était le luxe des riches. Elle est le droit de tous, et d'abord le droit des pauvres. En réalité, ce n'est pas le développement qui conduit à la démocratie, c'est la démocratie qui conduit au développement ! Elle porte en elle la circulation des idées, la liberté d'invention, la lutte contre la corruption, qui sont les conditions mêmes du progrès pour les peuples.

Le Parisien: Les politiques français, gauche et droite confondues, étaient-ils pro-Ben Ali jusqu'au 14 janvier?

François Bayrou: Gauche et droite confondues, Ben-Ali bénéficiait d'une indulgence et d'une connivence générales. Beaucoup n'hésitaient pas à profiter des avantages discrets du régime, de celui-là et de quelques autres.

Le Parisien: Avez-vous été approché par les amis de Ben Ali?

François Bayrou: Je n'ai jamais été « approchable ». Je tiens trop à ma liberté.

Le Parisien: Michèle Alliot-Marie doit-elle démissionner?

François Bayrou: L'image de la France souffre terriblement. Songez que les Tunisiens ont chassé leur nouveau ministre des Affaires étrangères parce qu'il avait flatté son homologue français. Le plus grave est que, dans cette situation, les gouvernants ne se rendent pas compte des conséquences de leurs actes, se croisent dans leur bon droit et crient au complot. La cause en est que le pouvoir comme on l'exerce en France isole de la réalité et fait perdre le sens commun. C'est une question d'importance nationale que de réformer l'exercice du pouvoir.

Le Parisien: Mais les Français semblent accepter ces dérives...

François Bayrou: C'est vrai. Tous les jours ont entend, sous forme d'excuse, « ça s'est toujours fait ». Le « ça s'est toujours fait » est insupportable. De Gaulle n'a jamais été soupçonné. L'Allemagne n'a pas ces faiblesses. Son ministre de la Défense a du démissionner parce qu'il avait utilisé un avion de l'armée pour gagner son lieu de vacances. Ce ne sont pourtant pas des démocraties de saints!

Le Parisien: Dans l'affaire Florence Cassez, y a-t-il eu faute de la France?

François Bayrou: Les propos violents et humiliants tenus contre le Mexique risquent de faire deux victimes: les relations entre la France et le Mexique, pays qui était, parmi les puissances du G20, un des plus proches de nous. Et surtout Florence Cassez elle-même, qui risque de se trouver verrouillée dans son enfermement. Le mécanisme actuel, fait divers-prise de position sensationnelle, est dangereux, il faut s'en écarter. 

Le Parisien: Dans ce dossier, comme dans l'affaire Laëtitia, le président de la République apparait comme le recours de première instance pour les familles...

François Bayrou: La compassion, le soutien, c'est bien et c'est juste. Mais se servir de tels drames pour en faire toujours le même scénario de communication: un drame, une émotion, un coupable, c'est affaiblir la fonction présidentielle.

Le Parisien: Le président de la République et certains de ses amis souhaitent supprimer l'Impôt sur la fortune. Est-ce une bonne idée?

François Bayrou: Non. Soutenir devant les Français que la priorité, dans la crise que nous vivons, est d'alléger encore la charge sur les plus favorisés, alors que les finances publiques sont à la rue et que tant de Français, y compris dans les classes moyennes, ont tellement de difficultés, cela pose une question: dans quel monde vivent-ils?

Le Parisien: Le pouvoir s'apprête à lancer un débat sur l'Islam...

François Bayrou: Le pouvoir et son parti croient pouvoir trouver un bénéfice électoral et se refaire en surfant sur cette mauvaise vague...

Le Parisien: Quelle vague?

François Bayrou: La peur de l'Islam, le rejet des musulmans. Ils veulent exciter les uns contre les autres pour obtenir des voix. Ils oublient que les guerres de religion sont mortelles. Tous ceux qui poussent à la division de la France, en ciblant les musulmans, veulent plaire à une partie de l'opinion, mais ils font prendre au pays un risque immense. Dans cette flambée, nous allons perdre le plus précieux: l'unité du pays, l'union de ses forces. Il faut donc parler au pays un autre langage, sans concession, et lui dire, les yeux dans les yeux, ceci: « Nous allons vivre ensemble! Nos enfants vivront ensemble, ils s'en sortiront ensemble, et seulement ensemble.» Si on les dresse les uns contre les autres, ils souffriront tous. Et nous avons l'arme la plus efficace et la plus rodée pour régler tous les problèmes qui se posent: la loi de 1905 sur la laïcité! Tout est dans la loi, y compris l'interdiction des prières dans l'espace public. Il suffit de l'appliquer sereinement.

Le Parisien: Dominique Strauss-Kahn est de passage à Paris ce week-end, ce qui provoque une étonnante effervescence...

François Bayrou: Cette agitation est ridicule. Politiques et médias, au lieu de se laisser manipuler par les agences de communication, devraient avoir un peu de sagesse et d'humour. Quand Dominique Strauss-Kahn parlera autrement que par formules sybillines, j'imagine que ça viendra un jour, un débat s'ouvrira. En attendant, ce sont de vains bruits que certains font avec leur bouche...

Le Parisien: Les propos de Christian Jacob sur DSK, qui n'incarnerait pas «l'image de la France des terroirs», ont été très critiqués...

François Bayrou: Disons qu'ils étaient au moins ambigüs. Pour moi je ne connais ni « vrai » ni « fausse » France. Je ne pense mon pays que comme une unité.

Le Parisien: On nous annonce la naissance prochaine d'une «confédération des centres», à l'initiative d'Hervé Morin, Jean Arthuis, Jean-Louis Borloo, dont la porte vous serait ouverte?

François Bayrou: Mettez vous bien ceci dans la tête: je ne participerai à aucun faux semblant. Vous le voyez bien: sur tous les sujets que nous abordons dans cette interview, il existe une autre politique, une autre pratique, un autre choix, un changement possible et nécessaire. C'est ce changement que je sers, pas les faux nez du pouvoir en place et les manipulations.

Le Parisien: Qu'allez-vous faire en Inde cette semaine?

François Bayrou: L'Inde sera bientôt le pays le plus peuplé au monde, avec des diplômés par dizaines de millions, des chercheurs par millions, et en même temps les pauvres les plus désespérément pauvres de la planète. Et ce pays de plus d'un milliard d'habitants est une démocratie, un pays libre. Comment pourront-ils se nourrir eux-mêmes, comment lutter contre l'effroyable inégalité et la corruption, comment éviter le terrorisme? Ce n'est pas seulement une question pour eux, c'est une question pour toute l'humanité. J'ai été un jeune homme fasciné par l'aura de Gandhi: aujourd'hui, la question du monde, c'est de mettre la démocratie au service du développement.

Source: Nathalie Segaunes, Le Parisien/Aujourd'hui en France

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