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5 octobre 2007

Soutenir l’économie solidaire

Article publié dans le journal Libération du 23 août 2007.

Le Grenelle de l’environnement doit aussi proposer un autre mode de développement économique.

Par Claude Alphandéry, président du Conseil national de l’insertion l’activité économique (Criae)

On peut se réjouir de la constitution, auprès d’Alain Juppé puis de Jean-Louis Borloo, d’un grand ministère de l’Ecologie, du Développement et de l’Aménagement durables. C’est le signe d’une prise en considération de notre environnement naturel, des menaces qu’il subit, de son implication dans toutes les activités humaines. La préparation d’un Grenelle de l’environnement apparaît également comme une promesse de traiter l’ensemble des problèmes ; et il est bon qu’ils soient approfondis, au préalable, au sein de six groupes de travail dont la composition comprend des sensibilités très diverses.

Il est frappant toutefois que ces travaux préparatoires ne fassent pas de place explicite à une réflexion sur la relation, la compatibilité entre l’ambition du développement durable et la représentation la plus courante de l’économie : dopée par les nouvelles technologies, la mondialisation et la déréglementation des échanges, et la surmultiplication des flux monétaires, celle-ci apparaît comme orientée avant tout vers l’efficacité financière, la compétitivité, le profit ; et cette représentation est portée par un puissant mouvement d’opinion ; celle des chefs d’entreprises qui voient dans toute disposition fiscale ou réglementaire contraignante un frein, un risque de perdre des marchés et qui dénoncent les mesures les plus élémentaires de taxation, de prévention, de contrôle, comme des coups portés à la croissance et à l’emploi. Opinion soutenue par l’ensemble des médias qui suscitent le désir et les réflexes des consommateurs fascinés par la publicité et par le reportage des pratiques ostentatoires des «élites». Ainsi se diffuse un fétichisme de la marchandise qui privilégie l’avoir immédiat au bien être durable. Certes la voix de quelques experts s’élève et l’opinion n’est pas insensible aux risques encourus. Certains immédiats et dont chacun peut trouver des exemples proches : effets de la pollution, accidents de la circulation etc. D’autres désormais relayés par les médias : réchauffement de la planète, pénurie d’eau potable… D’autres encore sur le nucléaire ou les OGM, contestés mais provoquant un trouble diffus. D’autres enfin imprévisibles, malgré la pléthore d’analystes financiers et la sophistication de leurs modèles économétriques, générés par l’excès ou l’insuffisance de liquidité monétaire.

Les Etats font écho à ces inquiétudes ; l’Europe donne parfois des directives ; des forums mondiaux jouent un rôle d’agitation. Des mesures sont prises qui ne sont pas inutiles mais ponctuelles, symptomatiques ; elles ne s’attaquent pas aux orientations fondamentales, elles esquivent le vrai problème. Comment s’assurer d’un développement durable sans sortir d’une économie unidimensionnelle tournée vers la seule efficacité financière et le profit et peu soucieuse des risques qu’elle génère ? Comment donner toute sa place à une économie respectueuse de l’environnement et de la cohésion sociale hors desquels le développement se casse ? Comment donner toute leur chance aux activités affirmant la solidarité des hommes entre eux et leurs liens avec la nature ?

Des initiatives existent qui constituent de premières réponses. On les trouve dans des activités de services et de soins individuels et collectifs, de commerce équitable, de bio agriculture, d’insertion professionnelle, de tourisme populaire, dans des manifestations culturelles, éducatives, sportives. Elles émanent le plus souvent des mouvements associatifs. Elles se situent, pour une part, sur le marché où elles vendent leurs prestations ; elles recourent néanmoins, pour les missions d’intérêt général qu’elles assurent, aux aides de l’Etat et des collectivités territoriales, au bénévolat et à une épargne non ou moins rémunérée. Initiatives nombreuses, encourageantes, souvent exemplaires ; elles constituent un vaste secteur d’économie solidaire qui ne se substitue ni à l’économie de marché ni à l’économie administrée mais qui les complète, et qui s’inscrit avec celles-ci dans une économie pluridimensionnelle plus soucieuse de cohésion sociale et plus respectueuse de l’environnement, donc dans une dynamique de développement durable et humain. Elles restent néanmoins encore marginales, jugées à tort improductives ou peu productives (alors que leur efficacité est considérable si l’on prend précisément en compte le développement durable et humain) ; elles sont déclassées, dépréciées par manque de reconnaissance et par insuffisance, par instabilité de leurs ressources.

Comment donc aller plus loin, modifier en profondeur la représentation que l’on se fait de l’économie, l’idée que sa seule finalité est le profit, comment la faire basculer dans un autre mode économique compatible avec le développement durable ?

Il faut pour cela, bien au-delà de mesures ponctuelles, donner à ce vaste secteur d’initiatives dispersées une cohérence et un élan, faire prendre conscience à l’opinion que l’élargissement des assises et de la portée de l’économie solidaire ouvre le chemin d’un autre mode de développement répondant au malaise, aux risques d’un monde déséquilibré par une financiarisation extrême. Un chemin ambitieux qui appelle des gestes politiques concertés entre l’Etat, les collectivités territoriales, les partenaires sociaux économiques et qui implique des moyens appropriés : aides publiques programmées sur plusieurs années sous réserve d’évaluation, appui à la formation d’employeurs sociaux, aux projets innovants, au bénévolat, à l’épargne solidaire. C’est une voie à laquelle le Grenelle du développement ne devrait pas manquer de contribuer.

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Commentaires
M
Enfin une épargne intéressante avec des valeurs de solidarité.
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